31 janvier - le paradis perdu - original
Jan. 31st, 2012 08:07 pm![[identity profile]](https://www.dreamwidth.org/img/silk/identity/openid.png)
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Titre : Le bonheur inachevé
Auteur :
Jour/Thème : 31 janvier - Le paradis perdu
Fandom : Original
Personnage : Lola/Alice
Raiting : PG-13
Disclaimer : Tout à moi.
Participation au vote de fin de mois : Non
« J’aimerais que tu viennes. Pas juste parce que je l’ai quitté et que je veux en parler, je veux dire, ce n’est pas vraiment comme si j’avais besoin d’en parler, surtout avec toi, mais… mais ça fait longtemps, tu vois, alors… un café, juste un café, tu veux bien ? »
Et elle a dit mon nom tout à la fin, comme de peur que je l’oublie dans ce silence, elle l’a prononcé comme avant et j’ai eu la gorge trouée, j’aurai aimé dire non mais ce n’est pas comme ça que ça marche, j’ai dis oui, ce grand oui, ce monstre de oui.
Je m’appelle Lola mais entre ses lèvres, c’est comme si je m’appelais Lolita et je déteste ça. Nabokov traine au fond d’un placard et il ne me fait penser qu’à elle alors je ne le lis pas.
Alice fait partie de ces gens qui entrent dans une vie si brutalement qu’on a soudain l’impression de n’avoir jamais connu personne d’autre qu’eux, et qui, petit à petit, grignotent tout l’espace. Ces gens qui se perdent dans les histoires d’amour, un peu comme moi peut-être, parce que j’avais la furieuse habitude de me donner toute entière, mais en gardant la maîtrise. Elle, c’était tout, mais sans barrière, que du blanc, que du noir, elle était prête à emporter le monde de son rire, et brusquement, je me suis retrouvée à être la plus faible et ça a été une histoire toute bête, elle et moi, de confiance, de pouvoir et de reconnaissance. Je n’arriverai même plus à la décrire, cette sensation de vide quand on détruisait l’appartement, et puis de rassurement, ses lèvres collées aux miennes. Il y avait nos mains tremblantes et ses regards riants.
On était là, toutes les deux avec nos angoisses, nos façons de nous cacher des autres, mais elle était trop vraie, elle, et moi trop lâche. Ça ne pouvait pas marcher.
Je me souviens d’Alice partout, elle a brûlé mon appartement de souvenirs. Alice et ses cigarettes qu’elle fumait enfermée dans le bureau, niant quand je rentrais d’avoir laisser la fenêtre close. Alice et ses chaussettes différentes qu’elle éparpillait dans tout l’appartement, lorsqu’elle avait trop froid puis trop chaud, ses paquets de mouchoirs dans chaque pièce, ses élastiques et ses pinces sur lesquelles je trébuchais tout le temps, et ses longs cheveux blonds. Elle mettait toujours trois sucres dans son café et grimaçait qu’il était trop sucré. Vidait le vin comme un verre d’eau, oubliait tout le temps ses clés, piquait des crises lorsque l’ordinateur plantait, finissait en larmes sous les oreillers dès que je me détournais.
Alice. Une part d’inconstance à laquelle je me cognais. Et que j’aurais tout fait pour garder, mais je n’ai jamais été très joueuse et quand on part, j’ai trop de fierté pour rouvrir les vieilles portes, pour sortir sous la pluie et me déchirer la gorge en rappelant quelqu’un qui ne veut plus de moi.
Alice, je l’ai rencontrée sur un toit. Ses lèvres étaient trop rouges et sa robe remontait sur ses hanches. On avait bu, tous, et dehors il faisait si lourd, même à minuit, si lourd, et on fumait, elle et moi, et on parlait, je ne sais plus de quoi. J’ai glissé sa main dans la mienne et que je l’ai serrée.
Je l’ai aimée un peu trop mal, un peu trop fort. Elle me rendait folle de faiblesse et je lui en voulais alors ; c’était un lourd silence qu’elle cherchait à détruire constamment, mon silence, le mien, qu’elle dévorait du bout des dents, et puis on a vieillie, un peu, les deux, et puis on a peut-être eu trente ans, je ne sais plus, mais elle est partie.
Je n’ai jamais été douée pour garder les gens, mais elle, c’était tellement différent que je me suis retrouvée là, comme une idiote, cinq ans après son départ, à boire le café qu’elle a commandée à ma place, à regarder l’alliance qui écrase mon ventre.
Elle me dit qu’elle s’est mariée, elle me dit qu’elle a eu une fille, elle me dit que ça ne va pas, qu’elle ne travaille plus, que tout ce fric la rend dingue, regarde cette ridicule bague comme elle vaut chère, je m’ennuie tellement que j’achète tout ce que je croise, et toi, raconte-moi, comment tu vas ?
« Pourquoi est-ce que je t’ai quittée ? », demande-t-elle.
Légèrement. Comme quand on demande le prix d’un café au serveur.
Elle a toujours ses yeux clairs, pas tellement bleus, pas tellement verts, un peu gris parfois, avec des tâches étranges qui accrochent les rayons de soleil. Elle me regarde comme si j’allais tout avouer, comme si soudain tout allait recommencer. Elle fume du bout des doigts, ne touche à rien.
Et je veux juste lui faire du mal, je veux juste la jeter à l’autre bout de la rue, briser les vitres, l’écraser, la piétiner, mais elle n’en ressortirait que plus forte, n’est-ce pas, et ce serait moi, juste moi, qui m’enfoncerait davantage.
Je souris. Je fume aussi.
« Tu voulais cet enfant plus que tu ne me voulais moi. », ai-je dit.
Elle s’est mise à pleurer alors. Très doucement. Ses doigts se sont cherchés, tordus, serrés. Elle secoue la tête pour dire non mais rien ne traverse ses lèvres, et puis elle pleure encore alors j’ai tout le ventre qui se tord mais je suis incapable, le sait-elle, je suis incapable de faire un pas vers elle.
Je l’aimais. Je l’aimais pour de vrai, avec mes silences, mon ivresse constante, ma faiblesse de nuit ; je l’aimais lorsqu’elle me déshabillait très lentement, hésitante, les lèvres serrées mais la voix toujours chantante, rassurante, quand elle secouait la tête pour donner du volume à ses cheveux et qu’elle grinçait des dents devant son miroir. Elle avait cette façon de tordre la bouche quand quelque chose la gênait, cette façon de sourire quand son cœur battait trop fort, ses mains me cherchaient la nuit, elle bloquait son visage contre mon cou et elle riait parfois trop fort. Elle me cherchait, partout, tout le temps, elle était là, elle s’étalait, ses mèches coulaient comme du miel sur les oreilles, ses doigts glissaient sur ma peau, ses ongles s’accrochaient à moi comme une noyée.
Et puis elle est partie. Et puis elle a rencontré cet homme qui lui a fait un enfant mais elle est là, maintenant.
« Ce n’est pas vrai, dit-elle enfin. Ce n’est pas vrai du tout. »
Je fais tourner trois fois mon verre entre mes doigts. Je ne souris plus tellement.
Ses yeux sont devenus secs si rapidement, c’était comme si elle n’avait jamais pleuré pour de vrai.
D’Alice, je me souviens le rire et je ne suis pas tellement forte, j’y pense maintenant, à moi, à elle, j’y pense maintenant en regardant son enfant, elle ne tourne pas la tête. Elle lui tient la main plus fort peut-être, parce qu’elle sait que je suis là et qu’on ne revient pas sur les vieilles histoires, qu’il ne faut pas passer son temps à s’en vouloir mais quand même, je n’arrive pas à me retenir, je me dis, c’est tellement bête : elle n’a jamais beaucoup aimé les hommes mais elle maîtrise si bien le mensonge qu’elle se fiche complètement de l’idée d’être heureuse.
Parce qu’Alice ne changera jamais : son bonheur est tout maîtrisé, sa grande scène reste le monde et je ne le lui pardonnerai jamais.
Auteur :
Jour/Thème : 31 janvier - Le paradis perdu
Fandom : Original
Personnage : Lola/Alice
Raiting : PG-13
Disclaimer : Tout à moi.
Participation au vote de fin de mois : Non
« J’aimerais que tu viennes. Pas juste parce que je l’ai quitté et que je veux en parler, je veux dire, ce n’est pas vraiment comme si j’avais besoin d’en parler, surtout avec toi, mais… mais ça fait longtemps, tu vois, alors… un café, juste un café, tu veux bien ? »
Et elle a dit mon nom tout à la fin, comme de peur que je l’oublie dans ce silence, elle l’a prononcé comme avant et j’ai eu la gorge trouée, j’aurai aimé dire non mais ce n’est pas comme ça que ça marche, j’ai dis oui, ce grand oui, ce monstre de oui.
Je m’appelle Lola mais entre ses lèvres, c’est comme si je m’appelais Lolita et je déteste ça. Nabokov traine au fond d’un placard et il ne me fait penser qu’à elle alors je ne le lis pas.
Alice fait partie de ces gens qui entrent dans une vie si brutalement qu’on a soudain l’impression de n’avoir jamais connu personne d’autre qu’eux, et qui, petit à petit, grignotent tout l’espace. Ces gens qui se perdent dans les histoires d’amour, un peu comme moi peut-être, parce que j’avais la furieuse habitude de me donner toute entière, mais en gardant la maîtrise. Elle, c’était tout, mais sans barrière, que du blanc, que du noir, elle était prête à emporter le monde de son rire, et brusquement, je me suis retrouvée à être la plus faible et ça a été une histoire toute bête, elle et moi, de confiance, de pouvoir et de reconnaissance. Je n’arriverai même plus à la décrire, cette sensation de vide quand on détruisait l’appartement, et puis de rassurement, ses lèvres collées aux miennes. Il y avait nos mains tremblantes et ses regards riants.
On était là, toutes les deux avec nos angoisses, nos façons de nous cacher des autres, mais elle était trop vraie, elle, et moi trop lâche. Ça ne pouvait pas marcher.
Je me souviens d’Alice partout, elle a brûlé mon appartement de souvenirs. Alice et ses cigarettes qu’elle fumait enfermée dans le bureau, niant quand je rentrais d’avoir laisser la fenêtre close. Alice et ses chaussettes différentes qu’elle éparpillait dans tout l’appartement, lorsqu’elle avait trop froid puis trop chaud, ses paquets de mouchoirs dans chaque pièce, ses élastiques et ses pinces sur lesquelles je trébuchais tout le temps, et ses longs cheveux blonds. Elle mettait toujours trois sucres dans son café et grimaçait qu’il était trop sucré. Vidait le vin comme un verre d’eau, oubliait tout le temps ses clés, piquait des crises lorsque l’ordinateur plantait, finissait en larmes sous les oreillers dès que je me détournais.
Alice. Une part d’inconstance à laquelle je me cognais. Et que j’aurais tout fait pour garder, mais je n’ai jamais été très joueuse et quand on part, j’ai trop de fierté pour rouvrir les vieilles portes, pour sortir sous la pluie et me déchirer la gorge en rappelant quelqu’un qui ne veut plus de moi.
Alice, je l’ai rencontrée sur un toit. Ses lèvres étaient trop rouges et sa robe remontait sur ses hanches. On avait bu, tous, et dehors il faisait si lourd, même à minuit, si lourd, et on fumait, elle et moi, et on parlait, je ne sais plus de quoi. J’ai glissé sa main dans la mienne et que je l’ai serrée.
Je l’ai aimée un peu trop mal, un peu trop fort. Elle me rendait folle de faiblesse et je lui en voulais alors ; c’était un lourd silence qu’elle cherchait à détruire constamment, mon silence, le mien, qu’elle dévorait du bout des dents, et puis on a vieillie, un peu, les deux, et puis on a peut-être eu trente ans, je ne sais plus, mais elle est partie.
Je n’ai jamais été douée pour garder les gens, mais elle, c’était tellement différent que je me suis retrouvée là, comme une idiote, cinq ans après son départ, à boire le café qu’elle a commandée à ma place, à regarder l’alliance qui écrase mon ventre.
Elle me dit qu’elle s’est mariée, elle me dit qu’elle a eu une fille, elle me dit que ça ne va pas, qu’elle ne travaille plus, que tout ce fric la rend dingue, regarde cette ridicule bague comme elle vaut chère, je m’ennuie tellement que j’achète tout ce que je croise, et toi, raconte-moi, comment tu vas ?
« Pourquoi est-ce que je t’ai quittée ? », demande-t-elle.
Légèrement. Comme quand on demande le prix d’un café au serveur.
Elle a toujours ses yeux clairs, pas tellement bleus, pas tellement verts, un peu gris parfois, avec des tâches étranges qui accrochent les rayons de soleil. Elle me regarde comme si j’allais tout avouer, comme si soudain tout allait recommencer. Elle fume du bout des doigts, ne touche à rien.
Et je veux juste lui faire du mal, je veux juste la jeter à l’autre bout de la rue, briser les vitres, l’écraser, la piétiner, mais elle n’en ressortirait que plus forte, n’est-ce pas, et ce serait moi, juste moi, qui m’enfoncerait davantage.
Je souris. Je fume aussi.
« Tu voulais cet enfant plus que tu ne me voulais moi. », ai-je dit.
Elle s’est mise à pleurer alors. Très doucement. Ses doigts se sont cherchés, tordus, serrés. Elle secoue la tête pour dire non mais rien ne traverse ses lèvres, et puis elle pleure encore alors j’ai tout le ventre qui se tord mais je suis incapable, le sait-elle, je suis incapable de faire un pas vers elle.
Je l’aimais. Je l’aimais pour de vrai, avec mes silences, mon ivresse constante, ma faiblesse de nuit ; je l’aimais lorsqu’elle me déshabillait très lentement, hésitante, les lèvres serrées mais la voix toujours chantante, rassurante, quand elle secouait la tête pour donner du volume à ses cheveux et qu’elle grinçait des dents devant son miroir. Elle avait cette façon de tordre la bouche quand quelque chose la gênait, cette façon de sourire quand son cœur battait trop fort, ses mains me cherchaient la nuit, elle bloquait son visage contre mon cou et elle riait parfois trop fort. Elle me cherchait, partout, tout le temps, elle était là, elle s’étalait, ses mèches coulaient comme du miel sur les oreilles, ses doigts glissaient sur ma peau, ses ongles s’accrochaient à moi comme une noyée.
Et puis elle est partie. Et puis elle a rencontré cet homme qui lui a fait un enfant mais elle est là, maintenant.
« Ce n’est pas vrai, dit-elle enfin. Ce n’est pas vrai du tout. »
Je fais tourner trois fois mon verre entre mes doigts. Je ne souris plus tellement.
Ses yeux sont devenus secs si rapidement, c’était comme si elle n’avait jamais pleuré pour de vrai.
D’Alice, je me souviens le rire et je ne suis pas tellement forte, j’y pense maintenant, à moi, à elle, j’y pense maintenant en regardant son enfant, elle ne tourne pas la tête. Elle lui tient la main plus fort peut-être, parce qu’elle sait que je suis là et qu’on ne revient pas sur les vieilles histoires, qu’il ne faut pas passer son temps à s’en vouloir mais quand même, je n’arrive pas à me retenir, je me dis, c’est tellement bête : elle n’a jamais beaucoup aimé les hommes mais elle maîtrise si bien le mensonge qu’elle se fiche complètement de l’idée d’être heureuse.
Parce qu’Alice ne changera jamais : son bonheur est tout maîtrisé, sa grande scène reste le monde et je ne le lui pardonnerai jamais.
(no subject)
Date: 2012-01-31 09:56 pm (UTC)(no subject)
Date: 2012-02-01 04:35 pm (UTC)