21 août - ne reviens pas - harry potter
Aug. 21st, 2006 09:17 pm![[identity profile]](https://www.dreamwidth.org/img/silk/identity/openid.png)
![[community profile]](https://www.dreamwidth.org/img/silk/identity/community.png)
Titre : Fuite (autrement dit, pas vraiment d'idée ^^;;;)
Auteur : Aélane
Jour/Thème : 21 août / ne reviens pas (+ un chouïa d'angst, thème du mois)
Fandom : Harry Potter
Personnage(s) : Draco Malefoy, Severus Snape (tome 6)
Rating : PG
Disclaimer : tout appartient à Mme J.K.Rowling jusqu’à sa mort et au-delà, c’est l’auteur, je ne suis qu’un amateur s’amusant à jouer avec l’envers de son tapis.
Participation au vote de fin de mois : non
Note : pour la licence poétique, on va dire que Poudlard n’est pas si loin que cela de la côte Nord de l’Ecosse (et pas eu le temps de betalecter hélas T_T).
D’étroites sentes serpentaient sous les frondaisons de jeunes chênes pour s’effacer quelques foulées plus loin sous des mares de boue. Elles réapparaissaient, fragiles, incertaines, au hasard d’une brassée de fougères pliant devant ses mains où les ronciers avaient déjà laissé leur tribut d’égratignures et d’épines.
« Cours » lui avait ordonné le Mangemort.
Et les larmes courraient sur son visage. Il arrivait à se convaincre qu’il sentait à peine ses bras le démanger ou sa peau le brûler là où les zébrures devenaient écorchures, à défaut d’oser s’arrêter juste un instant pour les soigner. Il était parvenu à se convaincre de choses bien plus pénibles par le passé. Il était presque parvenu à croire qu’il saurait se sacrifier pour épargner les siens, qu’il serait prêt à tout pour protéger ceux qu’il aimait, jusqu’à tuer.
« Cours donc » avait répété l’homme choisi par le Seigneur des Ténèbres pour le surveiller, lui, le traître dont l’ardeur était si vacillante qu’on avait dû menacer sa famille afin qu’il ne fuie pas son devoir, lui le couard dont la loyauté vacillait sous le poids de ses lâchetés.
Il fuyait. Il fuyait comme nul ne l’en aurait cru capable : à pied, jusqu’à ce que ses membres s’alourdissent, jusqu’à ce que sa gorge brûle, jusqu’au bout du monde, jusqu’à ce qu’il s’écroule pour ne plus jamais se relever. Il avait en effet feinté discrètement toutes les leçons sur l’Apparition et avait tout aussi soigneusement évité de penser pourquoi il était préférable qu’il en reste incapable, alors que le Seigneur des Ténèbres se repaissait de ses peurs, se délectait de ses échecs, du tatouage pour effrayer les commerçants veules aux plus ignobles insectes qui survivaient envers et contre tout à ses Avada Kedavra.
« Va-t-en » avait murmuré l’ami de jeunesse de sa mère, l’ami de cet oncle qu’il n’avait jamais connu, l’ami qui était venu le secourir quand il avait abandonné toute volonté de vivre, de survivre à tout prix, accomplissant sa tâche à sa place.
Il sursautait à chaque fois qu’il rompait ici d’un coup sec une brindille, émiettait là les feuilles mortes jonchant encore au tout début de l’été les sous-bois obscurs de la Forêt Interdite où il s’était enfoncé, aussitôt les limites de Poudlard dépassées. Il tendait en vain l’oreille, à l’affût de poursuivants, à l’affût de monstres, terrifié par des souvenirs à jamais vifs d’ombres buvant le sang des licornes. Il ne percevait que le silence, ce silence oppressant que sa fuite brisait. Il n’entendait pas le grouillement de scarabées tout de noir vêtus se traînant cahin-caha dans une muette agonie alors qu’il écrasait leur molle coquille sans les voir.
« Fuis, Draco » avait hurlé Severus Snape, le directeur de la Maison Serpentard, celui qui avait toujours protégé ses ouailles contre les injustices des autres, de tous les autres, quels qu’ils soient.
Il ignorait le volettement incessant des insectes de toutes sortes, le tapotement lointain d'un pic-vert qui regardait d’un œil curieux l'intrus en marchant la tête en bas sur la branche qu’il picorait, tandis que le tapis de fougères frémissait doucement sous la brise, par bouffées. Il n’entendait pas la course des araignées filant refaire leurs toiles, les colonnes de fourmis battant en retraite, le coassement des grenouilles se réfugiant dans les flaques qu’il faisait gicler sur son passage.
Son cœur commençait à battre, frénétique, à ses tempes.
« Ne reviens jamais » avait-il entendu derrière les paroles hachées de l’homme qui lui avait offert en cachette ses premiers livres de potions, du parrain qu’il aurait pu avoir si son sang avait été plus pur, si Lucius n’avait pas été tant vexé par la foudroyante avancée du jeune surdoué en magie noire.
Car Draco Malefoy n’avait plus rien vers quoi revenir. Depuis l’été dernier, il savait que nul au Ministère n’aiderait le fils d’un prisonnier d’Azkaban. Depuis qu’il L’avait rencontré, il s’était détaché de ses camarades. Seuls Crabbe et Goyle ne craignaient rien : leur bêtise les protégeait, des oreilles malveillantes comme d’eux-mêmes, ils avaient au fond pour seule ambition celle de devenir les plus grands mangeurs de gâteaux du monde sorcier. Depuis Beltane, Phtyx, son hibou grand-duc avait ramené, encore scellées, toutes les lettres à sa mère. Dumbledore mort, il ne pouvait plus se tourner du côté d’un Poudlard qu’il avait contribué à faire tomber de l’intérieur. Sa Seigneurie le tuerait si sa tante Bellatrix ne s’en chargeait pas auparavant, afin de laver l’affront fait au nom des Black.
Une fois la forêt disparue derrière les collines battues par les vents, il boitillait plus qu’il ne courrait, mais il continuait à fuir, sans jamais oser se retourner. S’il jetait un œil par-dessus son épaule à la sente qui s’était déjà évanouie dans la lande, il s’arrêterait, désorienté. Il réfléchirait. Il se perdrait dans la contemplation de ce qui aurait dû être, de ce qui avait été, de ce qui aurait pu changer. Il se laisserait rattraper par son passé ou par les Aurors ou par Potter ou par les Mangemorts - peu importait, ils étaient tous une seule et même chose. S’il se retournait, il ne pourrait plus repartir.
L’aube se levait à peine, un jour ou trois plus tard, lorsqu’il trébucha sur le sable. Il n’avait prêté nulle attention au bruit de l’océan, l’esprit gourd. Des traînées grisâtres s’élevaient de la mer la reliant au ciel, lourdes de pluie, bruissant d’orages à venir. Il dégraffa sa cape, délaça ses chaussures et s’assit au bord, tout au bord, trempant ses pieds fatigués dans le ressac, froid, si froid, puis, tête en arrière, s’affala contre la plage, épuisé, les membres liquéfiés, fermant les yeux. C’était fini. S’il ne pouvait faire demi-tour, il lui était impossible d'avancer où que ce soit. Il n’avait plus à tenter de courir encore un peu plus, pas après pas, des millions de pas devant l’autre. Au loin, l’horizon se noyait dans les flots gris de la mer.
Les vagues recouvrirent son rire rauque, son soulagement d’être enfin arrivé quelque part, fût-ce nulle part.
Auteur : Aélane
Jour/Thème : 21 août / ne reviens pas (+ un chouïa d'angst, thème du mois)
Fandom : Harry Potter
Personnage(s) : Draco Malefoy, Severus Snape (tome 6)
Rating : PG
Disclaimer : tout appartient à Mme J.K.Rowling jusqu’à sa mort et au-delà, c’est l’auteur, je ne suis qu’un amateur s’amusant à jouer avec l’envers de son tapis.
Participation au vote de fin de mois : non
Note : pour la licence poétique, on va dire que Poudlard n’est pas si loin que cela de la côte Nord de l’Ecosse (et pas eu le temps de betalecter hélas T_T).
D’étroites sentes serpentaient sous les frondaisons de jeunes chênes pour s’effacer quelques foulées plus loin sous des mares de boue. Elles réapparaissaient, fragiles, incertaines, au hasard d’une brassée de fougères pliant devant ses mains où les ronciers avaient déjà laissé leur tribut d’égratignures et d’épines.
« Cours » lui avait ordonné le Mangemort.
Et les larmes courraient sur son visage. Il arrivait à se convaincre qu’il sentait à peine ses bras le démanger ou sa peau le brûler là où les zébrures devenaient écorchures, à défaut d’oser s’arrêter juste un instant pour les soigner. Il était parvenu à se convaincre de choses bien plus pénibles par le passé. Il était presque parvenu à croire qu’il saurait se sacrifier pour épargner les siens, qu’il serait prêt à tout pour protéger ceux qu’il aimait, jusqu’à tuer.
« Cours donc » avait répété l’homme choisi par le Seigneur des Ténèbres pour le surveiller, lui, le traître dont l’ardeur était si vacillante qu’on avait dû menacer sa famille afin qu’il ne fuie pas son devoir, lui le couard dont la loyauté vacillait sous le poids de ses lâchetés.
Il fuyait. Il fuyait comme nul ne l’en aurait cru capable : à pied, jusqu’à ce que ses membres s’alourdissent, jusqu’à ce que sa gorge brûle, jusqu’au bout du monde, jusqu’à ce qu’il s’écroule pour ne plus jamais se relever. Il avait en effet feinté discrètement toutes les leçons sur l’Apparition et avait tout aussi soigneusement évité de penser pourquoi il était préférable qu’il en reste incapable, alors que le Seigneur des Ténèbres se repaissait de ses peurs, se délectait de ses échecs, du tatouage pour effrayer les commerçants veules aux plus ignobles insectes qui survivaient envers et contre tout à ses Avada Kedavra.
« Va-t-en » avait murmuré l’ami de jeunesse de sa mère, l’ami de cet oncle qu’il n’avait jamais connu, l’ami qui était venu le secourir quand il avait abandonné toute volonté de vivre, de survivre à tout prix, accomplissant sa tâche à sa place.
Il sursautait à chaque fois qu’il rompait ici d’un coup sec une brindille, émiettait là les feuilles mortes jonchant encore au tout début de l’été les sous-bois obscurs de la Forêt Interdite où il s’était enfoncé, aussitôt les limites de Poudlard dépassées. Il tendait en vain l’oreille, à l’affût de poursuivants, à l’affût de monstres, terrifié par des souvenirs à jamais vifs d’ombres buvant le sang des licornes. Il ne percevait que le silence, ce silence oppressant que sa fuite brisait. Il n’entendait pas le grouillement de scarabées tout de noir vêtus se traînant cahin-caha dans une muette agonie alors qu’il écrasait leur molle coquille sans les voir.
« Fuis, Draco » avait hurlé Severus Snape, le directeur de la Maison Serpentard, celui qui avait toujours protégé ses ouailles contre les injustices des autres, de tous les autres, quels qu’ils soient.
Il ignorait le volettement incessant des insectes de toutes sortes, le tapotement lointain d'un pic-vert qui regardait d’un œil curieux l'intrus en marchant la tête en bas sur la branche qu’il picorait, tandis que le tapis de fougères frémissait doucement sous la brise, par bouffées. Il n’entendait pas la course des araignées filant refaire leurs toiles, les colonnes de fourmis battant en retraite, le coassement des grenouilles se réfugiant dans les flaques qu’il faisait gicler sur son passage.
Son cœur commençait à battre, frénétique, à ses tempes.
« Ne reviens jamais » avait-il entendu derrière les paroles hachées de l’homme qui lui avait offert en cachette ses premiers livres de potions, du parrain qu’il aurait pu avoir si son sang avait été plus pur, si Lucius n’avait pas été tant vexé par la foudroyante avancée du jeune surdoué en magie noire.
Car Draco Malefoy n’avait plus rien vers quoi revenir. Depuis l’été dernier, il savait que nul au Ministère n’aiderait le fils d’un prisonnier d’Azkaban. Depuis qu’il L’avait rencontré, il s’était détaché de ses camarades. Seuls Crabbe et Goyle ne craignaient rien : leur bêtise les protégeait, des oreilles malveillantes comme d’eux-mêmes, ils avaient au fond pour seule ambition celle de devenir les plus grands mangeurs de gâteaux du monde sorcier. Depuis Beltane, Phtyx, son hibou grand-duc avait ramené, encore scellées, toutes les lettres à sa mère. Dumbledore mort, il ne pouvait plus se tourner du côté d’un Poudlard qu’il avait contribué à faire tomber de l’intérieur. Sa Seigneurie le tuerait si sa tante Bellatrix ne s’en chargeait pas auparavant, afin de laver l’affront fait au nom des Black.
Une fois la forêt disparue derrière les collines battues par les vents, il boitillait plus qu’il ne courrait, mais il continuait à fuir, sans jamais oser se retourner. S’il jetait un œil par-dessus son épaule à la sente qui s’était déjà évanouie dans la lande, il s’arrêterait, désorienté. Il réfléchirait. Il se perdrait dans la contemplation de ce qui aurait dû être, de ce qui avait été, de ce qui aurait pu changer. Il se laisserait rattraper par son passé ou par les Aurors ou par Potter ou par les Mangemorts - peu importait, ils étaient tous une seule et même chose. S’il se retournait, il ne pourrait plus repartir.
L’aube se levait à peine, un jour ou trois plus tard, lorsqu’il trébucha sur le sable. Il n’avait prêté nulle attention au bruit de l’océan, l’esprit gourd. Des traînées grisâtres s’élevaient de la mer la reliant au ciel, lourdes de pluie, bruissant d’orages à venir. Il dégraffa sa cape, délaça ses chaussures et s’assit au bord, tout au bord, trempant ses pieds fatigués dans le ressac, froid, si froid, puis, tête en arrière, s’affala contre la plage, épuisé, les membres liquéfiés, fermant les yeux. C’était fini. S’il ne pouvait faire demi-tour, il lui était impossible d'avancer où que ce soit. Il n’avait plus à tenter de courir encore un peu plus, pas après pas, des millions de pas devant l’autre. Au loin, l’horizon se noyait dans les flots gris de la mer.
Les vagues recouvrirent son rire rauque, son soulagement d’être enfin arrivé quelque part, fût-ce nulle part.