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Titre : En toute connaissance de cause
Auteur :
Alaiya666
Jour/Thème: 27 février / Poison
Fandom : Saint Seiya
Personnages: Aphrodite des Poissons, Thétis – Allusions à Albafika des Poissons
Rating: PG
Nombre de mots: # 1300
Notes: Très exceptionnellement, pour ce thème, je réutilise un court extrait de ma fanfiction “Une deuxième chance”. De fait, si l’univers de Saint Seiya appartient bien entendu à Kurumada, le cadre et la chronologie ne sont pas les mêmes. Petite explication : ici, Aphrodite a 24 ans. Six ans plus tôt, il s’est vu, contre son gré, confier sa nièce Thétis, devenue orpheline. Quelque peu immature et très joueur, Aphrodite décide très vite, après avoir détecté ses capacités, d’entraîner la gamine “pour de faux” et ce, malgré les mises en garde d’Aldébaran. Finalement, il aurait dû l’écouter…
Disclaimer: A Masami Kurumada & Shiori Teshirogi
Participation au vote de fin de mois : non
 

 

 

 

En toute connaissance de cause

 

 

Sanctuaire, Octobre 1986…

 

La gifle l'envoya bouler au fond de la serre et alors même qu'elle secouait la tête, encore étourdie par la violence du coup, elle fut étouffée par deux bras qui entourèrent ses épaules pour la serrer très fort contre un cœur affolé.

« Ne refais plus jamais ça, tu m'entends ! »

 

Elle parvint à se dégager juste assez pour se retrouver submergée par une cascade de boucles turquoises qui chatouillèrent ses joues.

« Mais enfin… pourquoi ? Si on peut le faire avec notre cosmos, alors pourquoi pas avec notre propre corps ?

- Depuis combien de temps joues-tu à ce "petit jeu" ? Fut la réponse indirecte qu'elle reçut sur un ton dont la fermeté cachait mal l'angoisse.

- Et bien… » Elle se releva, Aphrodite demeurant à genoux devant elle. Gênée, elle détourna le regard. « Je ne sais pas, peut-être depuis quelques semaines, je…

- Je te demande pardon. »

L'adolescente, stupéfaite, reporta son attention sur son oncle dont le beau visage venait de se voiler d'une gravité qu'elle ne lui connaissait pas.

« C'est de ma faute, poursuivit-il, Je ne pensais pas que… j'ai oublié de te mettre en garde.

- De me mettre en garde à propos de quoi ? Je ne faisais rien de mal ! »

 

Non, décidément, elle ne comprenait pas. Depuis qu'elle avait rattrapé son retard sur ses camarades, qu'elle avait acquis la maîtrise parfaite de son cosmos et de son septième sens, elle avait enfin la possibilité d'explorer sereinement ses propres capacités. Les arcanes des Poissons, Aphrodite les lui avait tous enseignés. Oh bien sûr, elle n'était pas encore tout à fait capable d'y déverser toute sa puissance, mais cela viendrait, elle s'entraînait chaque jour dans cet objectif. Ce temps passé à s'exercer lui avait également permis d'en décortiquer les rouages, de comprendre les mécanismes grâce auxquels son oncle et elle parvenaient à modeler et modifier le niveau atomique de leur énergie. Et ce qu'ils créaient… Elle en avait deviné les limites. Mais aussi le potentiel inexploité. C'était là, à sa portée, et bientôt elle aussi serait en mesure d'élaborer une attaque parfaite, une de plus à rajouter au crédit des chevaliers d'or de son signe, une… qui lui appartiendrait.

 

« Oh mon oncle, nous pouvons faire tant de choses ! »

Elle s'était laissée tomber devant lui et les mains jointes dans son giron, elle s'enthousiasmait, déjà oublieuse de la gifle qui avait rougi sa joue :

« Créer des roses, c'est merveilleux, mais nous pouvons aussi modifier la matière qui nous entoure, quelle qu'elle soit ! Elle peut avoir les mêmes effets que les fleurs et ainsi nous aurions la…

- Ton corps aussi, n'est-ce pas ? »

Il l'avait interrompue d'une voix consternée, avant de prendre ses doigts entre les siens :

« Et tu crois que la nature acceptera d'être à ce point manipulée ? Elle tolère déjà beaucoup de la part du Sanctuaire qui bafoue trop souvent ses lois essentielles. Mais toi… Comme moi, tu es née d'elle. Tu peux la plier à ta volonté, c'est vrai, mais tu serais bien ingrate de détruire ce qu'elle a créé avec tant de soin et de minutie… »

De son index libre, il retraça le contour délicat du visage de sa nièce qui laissa échapper un sourire indulgent.

« Que veux-tu que je risque ? Ce n'est pas très différent de ce que nous faisons déjà, et ne nécessite pas beaucoup plus d'énergie. J'y suis presque, mon oncle, bientôt, je pourrai générer du poison sans même avoir besoin de créer les roses ! »

 

Il scruta le regard de sa nièce, et n'y trouva que pureté. Elle ne mentait pas, ne dissimulait rien. Toute à sa joie et à sa satisfaction d'être enfin devenue celle qu'il avait espérée, elle s'adonnait corps et âme à ce qui n'était censé être qu'un "passe-temps". Et Aphrodite sut qu'il avait effectivement fait… Une erreur.

« Ce que je vais te dire est très important… Ce que tu penses avoir découvert a déjà été expérimenté par d'autres. »

Il fit mine de ne pas s'apercevoir de la déception qui chiffonna le visage de l'adolescente et poursuivit avec gravité :

« Ils ont été nombreux à l'avoir utilisé, mais cela fait plusieurs décennies que cet arcane a été banni de l'enseignement.

- Banni ?! » Il hocha la tête :

- C'était indispensable. Ceux qui sont morts au combat, en utilisant cette technique, sont encore les mieux lotis… Mais les autres, TOUS les autres ont succombé à la folie. Certains ont préféré se suicider. Et quoi qu'il en soit, aucun n'a jamais pu mener une vie normale avec cette capacité chevillée au corps. »

 

Touché. Il vit le bleu de ses yeux se troubler, ses lèvres s'entrouvrir sur une question qu'elle n'osait pas poser. Furtivement, il jeta un œil sur les doigts qu'il tenait entre les siens… Et les serra convulsivement tandis que sa mâchoire se bloquait. Comment avait-il pu être aussi insouciant ? Il aurait dû s'en rendre compte, ne serait-ce qu'à cause de "ça".

« Tissa… Regarde. »

Il lui avait levé les mains pour les porter jusqu'à son regard : « Qu'est-ce que tu vois ? »

Elle refusa d'observer et de détourner son attention de son oncle. Elle savait, bien entendu, et cherchait à percer en lui la solution du mystère. De cela aussi, il ne s'était pas assez préoccupé : avec douceur, il lui ferma son esprit tout en barricadant ses propres émotions. Si elle se rendait compte qu'il avait paniqué au-delà de la bienséance, elle perdrait très certainement confiance en lui, et il risquait de ne plus être en mesure de la contrôler.

Un contrôle qui, d'après ce qu'il se devait d'admettre à présent, était tout sauf dispensable.

 

« Tes ongles, finit-il par répondre, faisant fi de l'air de défi qu'elle lui opposait. Ils bleuissent. Bientôt, ce seront tes lèvres, puis le blanc de tes yeux, et enfin chaque parcelle de ta peau. Tu sais ce que signifie cette couleur, n'est-ce pas ?

- J'ai réussi à la faire disparaître, argua-t-elle, entre ses dents serrées.

- Quand ? Au tout début ? Après la première fois peut-être ? Et ensuite ?... Y as-tu réussi aussi facilement ? Tes mains me disent que non. Thétis… ce n'est pas réversible. »

 

Elle n'avait que quatorze ans se rappela-t-il alors, et bien qu'elle s'en défendît, était soucieuse de tenir son rang parmi ses camarades, de leur prouver qu'elle méritait d'être au milieu d'eux même si la charge de chevalier d'or ne lui écherait sans doute jamais. C'était d'ailleurs peut-être cela le pire : elle savait qu'elle ne serait pas tout à fait leur égale, mais ne souffrirait pas, ne supporterait pas d'être rejetée. Et si pour cela elle devait jouer les bravaches et se targuer de prendre des risques inconsidérés, alors elle le ferait. Elle n'avait tout simplement pas encore établi le lien avec des conséquences qu'elle redoutait plus que tout. Aussi, lui devait-il la vérité, pleine et entière :

« Tu peux vivre avec, concéda-t-il, mais tu devras le faire seule. Parce que lorsque ton corps tout entier sera devenu poison, que ton sang, ta sueur et tes larmes auront atteint leur degré de toxicité maximum, le moindre contact avec un autre être humain entraînera irrémédiablement sa paralysie, puis son décès. Ton corps sera, il est vrai, devenu la mort elle-même. Mais au prix de ta solitude. Et, Tissa… » Il prit son visage entre ses mains, effleurant ses tempes avec ses pouces, essuyant les larmes qui perlaient au bord des cils. « … Tu ne pourrais pas le supporter. Je ne veux pas que tu sois malheureuse alors tu vas me promettre que jamais, plus jamais, tu n'essaieras de manipuler ton propre corps, tu ne tenteras de redécouvrir cet arcane. Laisse-le aux générations passées. Aujourd'hui, le plus important pour moi, pour nous deux, c'est que tu sois libre. Et tu l'es. Alors… »

 

*_*_*_*

 

Elle s'était jetée dans les bras de son oncle ce jour-là, lui promettant, lui jurant avec force cris et sanglots que, non, jamais, plus jamais, elle ne renouvellerait ce genre d'expérience. Et elle avait tenu parole. Le bleu sous ses ongles avait fini par se résorber de lui-même au bout de quelques mois et lorsque plusieurs années plus tard, Saga avait accédé à sa requête en la nommant chevalier d'or des Poissons après le décès d’Aphrodite, le souvenir de cet épisode avait à ce point pâli qu'elle n'y avait pas repensé. Pas vraiment.

 

Jusqu’à aujourd’hui.

 

Elle jeta un dernier regard en direction de son adversaire, dont elle n’entrevoyait que difficilement la silhouette au travers du voile doré de son propre cosmos. Quelques degrés de plus, et il atteindrait son paroxysme. Sa plénitude.

 

Et la mort empoisonnée commencerait à dévaler dans ses veines.

 

 

« Ô Aphrodite, pardonne-moi… »

 

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